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Nous croyions que nous étions presque arrivés

Nous croyions que nous étions presque arrivés, mais c’est là que la véritable ascension commençait.

Ce jour-là la randonnée faisait une boucle, et à ce point de la balade, après déjà quelques temps de marche, nous apercevions la voiture un peu en contre-bas. Après la pause pique-nique, en pleine digestion en ce début d’après-midi, nous pensions que dans quelques instants nous allions pouvoir nous reposer de la matinée. Que neni ! Le chemin se mit à monter entre les bruyères arborescentes, les lauriers puis les pins. Les lychens accrochés aux branches nous indiquaient l’altitude et l’humidité de cet écosystème. Comme des cheveux d’ange suspendus aux sapins l’hiver au moment des fêtes, ils bougeaient au gré du vent. Ils me font toujours penser à des algues, et évoquent plutôt un fond marin que les hauteurs d’une montagne. Il faut dire que le volcan vient de là, il est sorti de la croûte terrestre enfouie sous les eaux il y a quelques millions d’années. Ce paysage est donc une mémoire de son passé atlante.

Combien de fois cela arrive-t-il que nous pensions avoir presque terminé une tâche, mais au final nous devons y rajouter quelques heures en plus pour voir enfin le travail accompli ? Le corps fatigué prend son désir pour une réalité, il se dit ça y est, je vais pouvoir me reposer. Mais l’épreuve est là, dans la persévérance, dans la découverte de ses capacités au-delà de ce que nous pensions, dans la fierté offerte en récompense une fois terminée l’activité.

La balade se déroulait comme un film avec des séquences, d’abord les fleurs jaunes, puis les cactus et les agaves bleutées, enfin le chemin se bordait de chardons violets, pour laisser place ensuite à des marguerites en bouquets blancs.  Chaque couleur avait sa vallée, son versant et son altitude. Le chemin qui les traversait reliait toutes les couleurs en une histoire.

Cette boucle était aussi la promesse d’autres futures découvertes. Comme des bras tentaculaires lancés autour du cercle, des chemins s’enfonçaient dans les vallées à flan de grottes et de murets en pierre, offrant à l’imaginaire la possibilité de nouvelles découvertes de territoires et points de vue sur la mer. Il faudra donc revenir, continuer de s’approprier la carte des paysages qui se déplie au gré des reliefs. Continuer de se laisser surprendre, par un aperçu de l’océan, par une odeur d’armoise, le son d’une petite chèvre, la chaleur d’une pierre, la taille d’un de ces lézards qui s’esquivent du chemin avec rapidité à notre passage. Continuer de s’approprier le paysage, en se disant, je connais ce chemin, je suis déjà passée par là. Le faire devenir familier. Le laisser nous surprendre encore car la saison a changé, il s’est paré d’autres fleurs, d’autres couleurs. Le nuage a bougé, il a créé d’autres ombres, d’autres contrastes. Continuer l’émerveillement. Cet état où l’on se sent lumineux, plein, joyeux, dans l’instant présent, en somme : vivant. La beauté nous aide à nous reconnecter à la vie en nous et autour de nous. Elle est le catalyseur pour nous rappeler l’importance de ces instants, pour vivre dans notre corps la chance de pouvoir expérimenter cette vie sur Terre. Remplis de lumière, nous pouvons à notre tour rayonner comme des soleils pour transmettre la bonne énergie autour de soi. La Nature est cette église dans laquelle il est bon d’aller se recueillir parfois, pour cueillir à nouveau la fleur de notre essence, car là en est le sens. Faire fleurir ce qui est en nous, ce qui est nous.

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