J’ai été élevée avec l’idée de l’importance de la justice, mettant au cœur de nos valeurs familiales les notions d’égalité, de mérite et d’autonomie.
Quelle difficulté donc, de se rendre compte que le monde n’est pas ainsi fait, mais qu’il est plein d’injustices qui ne dépendent pas de nos actions ! Emilie Amic le dit bien à travers une de ses vidéos, il faut « lâcher prise sur la notion de justice » afin de sortir du mode de victime et pouvoir passer à l’action, rebondir et se servir de la situation comme d’une opportunité.
Je suis entièrement d’accord avec toutes ces notions, mais quelle difficulté de les appliquer !
Nous qui avons été biberonnés par « Liberté, égalité, fraternité » inscrits au-dessus de chaque porte d’entrée d’école, comment ne pas tomber de haut lorsqu’on se rend compte que non, la justice n’existe pas toujours. Nous avons pourtant lutté de notre optimisme contre les phrases du type « de toutes façons la vie est injuste ». Mais force est de constater qu’à un moment donné il faut regarder la réalité en face.
La justice universelle, égalitaire n’existe pas.
Mince, comment, le père noël n’existe pas ?
En ouvrant les yeux, on se rend compte que des personnes ayant suivi la même formation, dans la même promo, avec des résultats à peu près identiques, au bout de quelques années, n’ont pas du tout les mêmes niveaux de vie. Alors certes il y a une part de choix personnels. Mais moi qui croyait, à coup de « self made man », que la vie ne dépendait que de nos choix justement, j’ai omis toute une partie : la zone externe de l’environnement, de la famille, etc … qui est une zone correspondant à des choses sur lesquelles nous n’avons pas forcément d’action directe. Ce sur quoi nous ne pouvons pas agir. Eh oui, la volonté seule ne suffit pas. Car même si à l’école nous étions jugés uniquement sur nos capacités, eh bien 10 ans plus tard, des données externes comme un héritage, ou une maladie, un accident, ou une famille aisée peuvent avoir un impact considérable sur le mode de vie mené par la suite.
Il en est de même avec les enfants. J’ai toujours cru que tout était sous la responsabilité des parents ou presque. Que finalement grâce à l’éducation, on pouvait gérer tous les caractères. Sauf qu’avec cette idée je donnais une place énorme à l’acquis et une toute petite à l’inné.
Et pourtant, il y a des bébés qui font leur nuit à 1 mois, d’autres à 3 ans. Et ce peut être dans la même fratrie. On perçoit même déjà les différences de caractère à travers le comportement du fœtus dans le ventre.
On ne peut donc pas oublier toute cette part de l’inné, de cette partie hors de contrôle.
Pourtant l’idée de pouvoir prendre sa vie en main, quel que soit le contexte, est séduisante, et nous donne une sorte de tout pouvoir enfantin.
Mais la réalité est là pour nous sortir de notre utopie.
Comment à l’inverse ne pas sombrer dans le négatif et garder tout de même l’espoir qui fait avancer ?
Comme le dit Kery James, qui prône le fait de sortir du mode ‘victime’ dans les banlieues, « il faudra se battre deux fois plus ». C’est à dire que oui, on peut obtenir des choses qui n’étaient pas évidentes au début au vu de notre situation. Et là est la part de notre volonté et de notre contrôle/action. Mais pour y arriver il faudra se battre « deux fois plus » que d’autres. Et donc là on perd la notion d’égalité.
Nous ne partons donc pas tous depuis la même ligne de départ. On ne sait pas quelle distance nous allons réussir à parcourir. Peut-être que certains partis loin derrière arriveront à devancer certaines autres personnes. Mais dans cette espèce de course au bonheur, plutôt que de se comparer aux autres, il faut tout d’abord accepter son point de départ. Et tenter d’aller un peu plus loin, sur cette génération.
Et si l’on se compare à soi-même, on ne peut que progresser ! Car on trouvera toujours quelqu’un qui court plus vite que nous, et la comparaison aux autres nous déprimera à coup sûr.
Alors quel est le prochain pas que nous pouvons faire dans la direction de notre bonheur ?