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La culpabilité et l’avis des autres

Et si nous mettions la culpabilité dans une boîte, à côté de l’avis des autres ? Et si nous laissions cette boîte dans un coin, à quoi ressemblerait notre vie, notre quotidien ?

Quel allègement ! Prêtez attention, ne serait-ce qu’une journée, à toutes les choses que vous feriez, si vous ne pensiez pas au qu’en dira-t-on, à ce qui est bien vu ou mal vu selon notre société, notre culture ? Bien-sûr tout en restant dans le cadre de la loi quand même !

Je pense notamment à cette tâche difficile qu’est l’éducation des enfants. Combien de mères perdues, face à un choix : quel comportement adopter ? D’un côté on crie « éducation positive », et de l’autre on crie « il faut poser des limites ». D’un côté on dit « allaitement à la demande » et de l’autre « n’oubliez pas de prendre soin de vous ». Ces injonctions antinomiques, à l’heure du choix et sous couvert de fatigue, rendent toute micro-décision impossible à prendre.

Pourtant nous aimerions bien suivre un ordre bien-pensant, ce serait tellement plus simple ! Mais comme chaque chapelle prêche ses convictions avec force, il faut une sacrée personnalité pour imposer ses opinions. Ce qui est fort c’est que ces injonctions s’impriment dans le cerveau des mères, et ce sont elles-mêmes qui s’imposent ce cauchemar. Car personne n’est là au sein de leur foyer pour leur dire comment éduquer leurs enfants, elles sont libres, et les papas aussi ! Chaque couple peut intervenir selon ses convictions, envies, besoin, sa créativité. Quelle grande liberté ! Et finalement quelle difficulté !

Car sans chemin tracé à suivre, chaque pas est un choix, chaque phrase est une décision, et assumer tout cela n’a rien de simple. D’autant qu’on peut se tromper, tâtonner, expérimenter. D’autant que l’éducation n’est pas une science exacte, qu’on ne saura que dans 10 ans les conséquences de nos préceptes d’aujourd’hui, et qu’aucune généralité ne saurait s’appliquer à l’individualité d’un être unique, nouveau, différent de tout ce qui a été créé sur cette Terre auparavant. Alors certes il y a parfois des similitudes. Mais comment savoir si cette fois-ci s’en est une … ou pas ?

Dans ce surplus d’informations, de conseils, de « il faut », une seule voie : l’intuition.

Lorsqu’on s’écoute, même si cela va à l’encontre de la généralité, le résultat est le plus souvent sûr. Nous parlerons de l’intuition dans un autre article, sujet en soi.

Et une fois le choix prix, la décision actée. Combien sommes-nous à nous encombrer de la culpabilité ?

J’ai pris la décision de lire un livre au lieu de jouer avec mon fils ce matin. Et tout à coup je suis de mauvaise humeur. La partie de plaisir est finie, il va falloir que je paye maintenant. Je me mets à astiquer la cuisine, je réponds à toutes les demandes de la maisonnée. Personne ne me le demande. Simplement cette voix intérieure héritée de générations de femmes saintes qui ont su s’occuper de tout le monde en se mettant de côté, sans jamais se plaindre. Le poids est lourd à porter. La honte, le non-mérite s’abattent sur moi. Je suis responsable, j’ai fait un enfant, je dois m’en occuper. M’en occuper tout le temps, à tout prix ? N’est-il pas capable, lui, de s’occuper seul quelques instants voire quelques heures ?

Je prends cet exemple mais il y en a tant d’autres.

Et si, en mettant cette culpabilité dans la boîte, nous voyions ce que cela produit dans notre quotidien ? Peut-être que finalement nous perdrions cette agressivité qui soudain surgit en nous, et pas seulement contre nous, mais aussi sur les autres ?

Ce qui est aussi difficile avec cette nouvelle prise de position, c’est qu’on se rend compte que le monde peut continuer sans nous. L’autre soir je décidais de me retirer dans la chambre pour regarder une série, avant même l’heure du coucher de notre fils. Son père a très bien géré. Et le petit bonhomme n’a même pas réclamé sa maman. En découvrant cela, deux sentiments contradictoires me sont venus : j’étais soulagée, je n’avais pas eu à intervenir, j’avais eu le droit à un moment de détente sans contrepartie; et en même temps je me sentais triste, je n’avais pas manqué à mon fils, il n’avait pas eu besoin de moi.

En acquérant plus d’autonomie, on en donne aussi à notre entourage et à nos enfants. Quelle belle leçon de vie ! Mais l’autonomie rime parfois avec solitude. Et pourtant, même si parfois notre entourage n’a pas besoin de nous (ce qui nous permet de nous accorder des instants de liberté), eh bien parfois il aura besoin de nous. Et parce que nous aurons su prendre ces moments de répit, que nous aurons su nous ressourcer quand cela était possible, nous serons là, nous serons là quand ils auront besoin de nous.

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